On en parlait depuis… 1973. A l’instar d’autres villes wallonnes comme Jodoigne, la nécessité d’un contournement est apparue à Couvin dès le début des années septante, essentiellement pour libérer le centre-ville des nombreux poids lourds en transit. Mais, à la différence de Jodoigne où les tout premiers coups de pelleteuses ont été mis en scène à quelques semaines des élections communales, le contournement de Couvin est déjà partiellement ouvert au trafic et devrait être entièrement terminé au second semestre 2020.
Pourrons-nous emprunter ce nouvel axe pour descendre vers la France dès cet été ? C’est possible, mais pas encore certain. Tout dépendra des conditions climatiques d’ici là. Seul le tunnel sous les voies ferrées à Frasnes-lez-Couvin sera alors encore source de ralentissements, car encore en travaux, bien que la circulation aura déjà basculé dans la partie du tunnel déjà construite (suppression du passage à niveau). Côté français, les 22 derniers kilomètres faisant la jonction entre le réseau autoroutier existant et la frontière belge ont été ouverts à la circulation en juillet 2018.
130 millions d’euros (176 millions si l’on compte les expropriations) pour réaliser environ 14 kilomètres de voiries au gabarit autoroutier avec pas moins de 36 ouvrages d’art : le coût de ce méga projet en fait, et de loin, le chantier d’infrastructures routières le plus onéreux en cours actuellement en Wallonie. Les quelques chiffres-clés qui suivent illustrent bien l’ampleur du projet :
5 500. 000 m3 de terrassement, 300 000 m2 de routes en béton, 30 000 m3 de béton pour les ouvrages d’art, 55 km glissières de sécurité, … Le chantier a été soumissionné en 3 phases, la société momentanée Bam contractors / Galère / Wanty s’occupant des phases 1 et 2 et l’entreprise Jan De Nul prenant en charge la phase 3.
Héloïse Winandy, porte-parole de la SOFICO : « Ce projet œuvre incontestablement au développement économique, social et touristique de toute une région. Réaliser ce chaînon manquant du réseau routier permet notamment, au niveau local, d’améliorer le cadre de vie des habitants de Couvin en les soulageant d’un important trafic de transit. Cette autoroute de près de 14 kilomètres permet de développer de nombreuses synergies entre le nord de la France et le sud de la Belgique. Elle va désenclaver économiquement toute la région au sud de Charleroi. A plus grande échelle, elle parachève un itinéraire européen entre le nord de l’Europe et la Méditerranée. »
Le chantier a débuté en octobre 2011 et, depuis le 17 octobre 2017, les Couvinois sont soulagés puisque le premier tronçon de 4,6 kilomètres entre Frasnes et le Ry de Rome est ouvert à la circulation. Ce qui représente 200 000 camions en moins par an en transit dans le centre-ville ! L’objectif d’améliorer la qualité de vie et la sécurité des riverains est donc d’ores et déjà atteint à l’issue de la phase 1.
Les travaux de la deuxième phase (8,1 km entre le Ry de Rome et Brûly) ont commencé le 20 août 2015 et s’achèveront durant le second semestre 2019, dans le courant de l’été. La phase 3, qui consiste à construire une tranchée couverte à Frasnes sous la voie ferroviaire, a débuté le 3 octobre 2016 et devrait s’achever au second semestre 2020. Une circulation en 2 fois une bande sera toutefois possible dans une demi-trémie mi-2019.
Durant cette phase 2, il a fallu faire face à des problèmes liés à la nature du sol, tout aussi impossibles à détecter que ceux de la première phase lors des essais géologiques. Les profils des talus ont dû être adaptés, ainsi que les dimensions de trois ouvrages d’art.
Delphine Cauchie, ingénieure responsable du projet pour le SPW : « Ce qui impressionne le plus dans cette phase, ce sont les quantités et plus particulièrement le nombre de m³ de terre déplacés, nombre de m³ revu à la hausse suite aux différentes phases de déplacement de terre (couchage de talus, conséquence des problèmes géologiques). Nous voulions éviter de mettre sur les routes des milliers de camions pour évacuer ces terres… Mon prédécesseur, Jean-Luc Lecomte s’est efforcé de trouver des solutions pour garder ces terres sur chantier et ainsi réduire les nuisances. »
La troisième et dernière phase vise à construire un ouvrage d’environ 800 mètres de long dont 80 mètres de tunnel pour permettre le passage de la N5/E420 sous la voie ferroviaire. Cette trémie sera, en venant le Charleroi, la porte d’entrée du contournement de Couvin en direction de la France.
Delphine Cauchie : « L’ouvrage se compose de deux demi-tunnels. L’égouttage et le drainage du premier demi-tunnel sont en cours d’exécution. Une partie de l’ouvrage, et donc de la future voirie, se trouve sous le niveau de la nappe phréatique. Ceci a des conséquences sur les travaux (résurgence d’eau lors des terrassements : eau et boue en permanence sur chantier et ce, malgré les pompages en service 24h/24) et a nécessité la mise en place d’un système de drainage complexe (au pied des talus, en tête de talus, en partie supérieure le long des parois de pieux sécants, sous la voirie dans la partie couverte). »
Autre contrainte, et non des moindres : le maintien de la circulation ferroviaire et automobile (sur la N5 longeant le chantier) durant les travaux, avec des conséquences importantes sur l’organisation du chantier et la sécurité. De brèves coupures de trafic ont dû être planifiées en bonne collaboration avec Infrabel pour permettre de réaliser certaines opérations (interdiction pour des raisons de sécurité évidentes de travailler à moins de 6 mètres de la voie).
Delphine Cauchie : « La pose du complexe routier (sous-fondation, fondation, revêtement tout ou partie) commencera au printemps. Nous prévoyons le basculement de la circulation dans l’ouvrage à la mi 2019. Ceci permettra la suppression du passage à niveaux. La construction du deuxième demi-tunnel devrait durer 1 an environ. »