Lire un livre, écouter de la musique, aller au théâtre relève d’un choix contrairement à l’architecture qui s’impose à tous. Nous évoluons dans un cadre bâti (ou non bâti) que nous n’avons pas choisi, ce qui rend le geste de l’architecte encore plus essentiel. Ne pas oublier que l’architecture fait partie du patrimoine culturel. Ne pas oublier que l’architecture peut apporter des réponses à l’urgence climatique et environnementale ? Ne pas oublier que l’architecte est au centre du processus constructif. Comme nouveau Président élu du Conseil francophone et germanophone de l’Ordre des Architectes (Cfg-OA), je tiens à remettre au centre des réflexions et actions des thèmes qui relèvent de l’essence même de notre profession.
Tout d’abord, il est utile de préciser que l’Ordre des Architectes est une institution légale (loi du 26 juin 1963) qui a pour mission première d’encadrer la profession d’architecte afin de garantir au citoyen (maître d’ouvrage) le recours à des professionnels qualifiés, compétents et en mesure d’offrir des services de qualité. Dans ce cadre, l’Ordre veille d’une part, aux conditions d’accès à la profession et d’autre part au respect des règles éthiques et déontologiques.
Mais la mission de l’Ordre des Architectes ne peut se limiter à ces aspects : la défense et la protection du citoyen impose une vision nettement plus extensive des compétences de l’Ordre, vision qui doit notamment reposer sur les 3 thématiques essentielles suivantes :
1. L’architecture, un art vivant qui appartient au patrimoine culturel
L’Ordre doit rappeler que l’architecture est avant tout un art vivant et il se doit de défendre son aspect sociétal et culturel. Les architectes façonnent l’environnement bâti (et non bâti) dans lequel les gens évoluent. Cet environnement a évidemment un impact sensible sur la façon dont les gens vivent, travaillent et interagissent. Alors que l’architecture remplit les fonctions essentielles de notre société – fonction d’identité, fonction sociale, fonction historique, … – elle est trop souvent négligée par nos dirigeants.
Il faut que l’Ordre œuvre pour que la culture du bâti (de qualité) soit intégrée dans les politiques menées dans les différents niveaux de pouvoir.
2. L’architecture, une réponse à l’urgence climatique et environnementale
Le secteur de la construction représente la part mondiale la plus importante d’émissions de CO2. Les architectes doivent se positionner de manière radicale dans la lutte contre le réchauffement climatique : notre responsabilité est immense. L’Ordre doit défendre une architecture durable, consciente et responsable. Il doit notamment encourager ses membres et tous les acteurs concernés à concevoir des interventions architecturales aux effets limités sur l’environnement, à privilégier la rénovation urbaine et la réutilisation adaptative du patrimoine bâti, à reconquérir les centres-villes, à favoriser les propositions innovantes, …
En ce domaine, la responsabilité est collective et chacun doit assumer sa part : les entreprises du bâtiments, les producteurs de matériaux, les bureaux d’études techniques, les administrations publiques, …
Il faut que l’Ordre participe activement aux politiques de lutte contre le réchauffement climatique.
3. L’architecture, un moteur économique
Il n’y a pas de bâtiment sans architecte. Il n’y a pas de construction réalisée sans autorisation accordée. Aujourd’hui, la durée des procédures de permis d’urbanisme est excessivement et anormalement longue. Cette lenteur dans la gestion des demandes de permis et l’incertitude des réponses qui y sont réservées découragent de nombreux investisseurs et rendent frileux les particuliers à s’engager dans des projets un peu conséquents de construction ou de rénovation. Les interminables attentes d’autorisation de bâtir mettent en hibernation une partie importante de l’économie liée au bâtiments (entrepreneurs, chauffagistes, électriciens, plombiers, …). La digitalisation des procédures en Wallonie et une rationalisation de la gestion des dossiers à Bruxelles doivent impérativement être mises en place
Il faut mettre dans les priorités de l’Ordre la défense de ses propositions visant à diminuer sensiblement la durée des procédures de permis d’urbanisme et à limiter le degré d’incertitude de leur issue et ce en rappelant par ailleurs qu’il est question de permis d’urbanisme et non de permis d’architecture !
L’architecture est partout et dans tout. Elle est le reflet de la société, de notre identité, de notre histoire, de nos actions et de nos valeurs. Elle doit également refléter nos espoirs.
Francis Metzger
Président de l’Ordre Francophone et Germanophone des Architectes
Architecte, fondateur et gérant de Ma2