Tout qui les aura fréquentés plus ou moins récemment aura constaté que bon nombre de bâtiments scolaires en Wallonie et à Bruxelles sont en piteux état. Interpellé et conscient qu’un enseignement de qualité passe aussi par des infrastructures qualitatives, le ministre Frédéric Daerden a décidé de mettre fin à plusieurs décennies de désinvestissement dans les bâtiments scolaires. Il a chargé Chantal Dassonville, jusqu’alors à la tête de la Cellule archi de la FWB, de la coordination d’une ambitieuse réforme des bâtiments scolaires. Vaste et passionnant chantier !
Sécurité incendie, performance thermique et acoustique, accessibilité aux PMR, … autant d’enjeux réclamant une certaine urgence afin de pouvoir accueillir élèves et enseignants de manière adéquate. Sans compter la pression démographique, qui appelle à ouvrir de nombreuses places supplémentaires dans les écoles dans certaines zones pour les années à venir.
La réforme des bâtiments scolaires dépasse cependant de loin le besoin de répondre aux urgences. Elle vise à transposer physiquement sur le terrain la réforme pédagogique née du Pacte d’excellence : tronc commun pour tous jusqu’à 15 ans, proposant un enseignement classique mais également manuel et artistique, ouverture de l’école au quartier, … Cet enjeu pédagogique en croise un autre, tout aussi important : répondre aux ambitions climatiques. Chantal Dassonville : « On parle actuellement d’un objectif 2040 pour rendre l’ensemble du parc immobilier conforme, tous réseaux confondus, enseignement supérieur compris. Cela nous laisse 20 ans ! D’ici fin 2021, nous devons avoir construit une stratégie immobilière énergétique. Bien entendu, nous allons profiter de cette stratégie pour intégrer tous les autres paramètres. » La réforme se veut donc intégrale : Pacte d’excellence, ambitions climatiques et remise à niveau qualitative des bâtiments scolaires.
Le montant de 1,2 milliards d’euros, cité au début du projet, a le mérite de situer l’ampleur du chantier mais doit encore être précisé. Chantal Dassonville : « L’idée est que l’on pourrait aller vers plusieurs modes de financement en fonction du type d’intervention. Nous aurions en effet une stratégie différente suivant les cas de figure : infrastructure incapable d’absorber les nouveaux critères et que l’on démolit pour construire du neuf, infrastructure ayant encore du potentiel et pour laquelle on procède par rénovation lourde, ou infrastructure en bon état qui peut être améliorée par des interventions plus ponctuelles. Nous entrons dans une nouvelle vague de plans européens, fonds structurels ou plans de relance. La grille de lecture climatique peut en ce sens représenter une porte d’entrée pour notre réforme. »
Si le réseau WBE, via ses directions régionales, connaît bien son patrimoine immobilier, la nécessité de disposer d’un cadastre des bâtiments scolaires des autres pouvoirs organisateurs ne s’est encore jamais vraiment fait ressentir. Cela pourrait changer : « On parle aujourd’hui d’un cadastre de l’ensemble des bâtiments scolaires, en ce compris ceux dont nous ne sommes pas propriétaires. Il ne serait cependant pas exhaustif, mais basé sur des critères nous permettant de mieux orienter les subventions pour répondre aux enjeux fondamentaux. »
« Partout où se trouvent encore des bâtiments préfabriqués datant des années 60, nous savons qu’il faudra démolir et reconstruire. Les grosses rénovations offriront aussi l’opportunité d’apporter de la qualité architecturale. Dans le PPP flamand (Scholen van Morgen), l’équipe du bouwmeester fut impliquée dans certains projets. Cela a généré une certaine qualité architecturale. S’il y a un secteur dans lequel on a envie de promouvoir la qualité architecturale, c’est bien celui des écoles. Proposer à nos enfants un environnement de travail de qualité pour qu’ils intègrent cette dimension qualitative dans leur regard sur le monde extérieur, c’est bénéfique pour tout le monde ! »
En ville ou en milieu rural, les bâtiments scolaires sont des équipements structurants. A ce titre, leur conception appelle à davantage de collaboration avec toutes les parties concernées : urbanisme, mobilité, infrastructures sportives … Chantal Dassonville a également un message à faire passer aux entreprises : « Afin de faire aboutir cette stratégie de rénovation de la totalité du parc scolaire d’ici 2040, nous allons avoir besoin de compétences dans les entreprises pour réaliser tous ces travaux. D’autant que nous ne serons pas les seuls sur le marché à vouloir mettre à niveau des bâtiments pour atteindre les ambitions climatiques. Les entreprises vont donc devoir se mettre en ordre de marche pour faire face à ces typologies de travaux. Il va y avoir du boulot ! »