Un plan d’action national, comportant un recours à l’intelligence artificielle, doit réduire l’impact des comportements à risque sur le trafic
Chaque jour, intrusions dans les voies et incidents aux passages à niveau occasionnent plus de 12h de retard sur l’ensemble du réseau ferroviaire. Face à ce constat, le gestionnaire du rail lance un plan d’action national. Axé sur 3 piliers (sensibilisation, prévention et répression), il comporte une salve de mesures, dont plusieurs innovantes, qui doivent permettre d’améliorer la ponctualité tout en sauvant des vies. Infrabel mise, entre autres, sur un recours inédit à l’intelligence artificielle à hauteur de certains passages à niveau.
« Connais ton ennemi, et connais-toi toi-même, pour être victorieux ». Ce principe, extrait du traité de stratégie « L’art de la guerre », Infrabel l’applique dans sa lutte pour une meilleure régularité du trafic. Afin d’identifier les comportements dangereux trop fréquents, et les motivations de celles et ceux qui les commettent, le gestionnaire du rail a questionné un échantillon de 1000 personnes*. Il en ressort que le Belge connaît bien les règles mais sous-estime les risques. Ainsi, 48% des personnes sondées se disent « prêtes à traverser les voies », principalement « pour prendre un raccourci » (15%) ou « par absence de danger » (13%). Une imprudence que 41% des sondés commettent également aux passages à niveau. Leurs principales excuses : la distraction (22%) et l’absence d’un sentiment de danger (19%).
En analysant les incidents et leurs conséquences, mais aussi en s’appuyant sur les enseignements de cette enquête, Infrabel développe un plan d’action national de lutte contre ces causes dites « tierces ». L’an dernier, 31 accidents (et 324 incidents) à hauteur des passages à niveau, ainsi que 632 intrusions répertoriées sur le domaine ferroviaire, ont occasionné en moyenne plus de 12h de retards quotidiens (10h pour les intrusions et 2h25 pour les passages à niveau). Afin d’enrayer ce phénomène sociétal inquiétant, Infrabel renforce son arsenal… mais compte aussi sur des partenaires pour une approche multidisciplinaire.
* Enquête IPSOS réalisée online du 12 au 26 février 2024, auprès de 1000 personnes âgées de plus de 16 ans résidant en Belgique
Infrabel mise depuis toujours sur la sensibilisation. La récente campagne digitale « La parole à ceux qui restent » a généré plus de 6 millions de vues. Une nouvelle campagne, diffusée sur divers canaux, sera lancée dans les prochains mois avec pour ambition de motiver les changements de comportement. Le gestionnaire du réseau est également très présent dans les écoles sous la forme de jeux éducatifs. De nouvelles animations adaptées au jeune public seront initiées cette année.
Sur la plan de la prévention, autrement dit les mesures d’adaptation de l’infrastructure, les efforts ont été nombreux ces dernières années et ils se poursuivront en 2024. Entre autres :
Benoît Gilson, CEO Infrabel : « La sécurité tant routière que ferroviaire, mais aussi la ponctualité, sont essentielles pour tout un chacun. Pour améliorer la ponctualité, il est indispensable de s’attaquer, ensemble et grâce à un plan d’action national, au problème sociétal que constituent les comportements dangereux aux abords des voies. Un respect strict des règles apporterait un impact positif légitimement attendu par les clients du rail! »
En matière de répression, Infrabel s’appuie sur sa collaboration avec les services de police qui mènent des opérations coup de poing… unique manière de convaincre celles et ceux que seules dissuadent les sanctions financières. Autre nouveauté : Infrabel entend initier cette année des séances de médiation, destinées aux mineurs pris sur le fait, se substituant à un procès-verbal.
D’ici mi-mai, Infrabel rendra opérationnel un système inédit – basé sur l’intelligence artificielle (AI) – d’identification d’un risque à un passage à niveau. Des tests réalisés depuis mi-2023 sur 2 de ces intersections « rail-route » (rue de Balard à Namur et Deurnestraat à Mortsel) ont mis en lumière la fiabilité de cette nouvelle technologie. Concrètement, lorsqu’une personne ou un véhicule s’immobilise longuement sur un passage dont les barrières sont ouvertes, un son retentit et une vue des lieux s’affiche au sein du centre de gestion du trafic d’Infrabel. Si l’opérateur identifie un risque imminent, il a la possibilité d’interrompre instantanément le trafic pour éviter une collision aux conséquences souvent très lourdes.
Les 1621 passages à niveau subsistant sur le réseau ne seront pas tous équipés. Dans une première phase, les experts d’Infrabel en ont identifié 70 présentant un risque élevé (le plus souvent des remontées de file, phénomène à l’origine de 40% des accidents). D’ici la fin de cette année, ils seront dotés de caméras « AI » pour un coût unitaire de 10.000€.
Georges Gilkinet, Ministre fédéral de la Mobilité : « Les intrusions sur les voies et le non-respect des règles aux passages à niveau mettent non seulement des vies en danger, mais sont aussi l’un des facteurs qui impactent la ponctualité de nos trains. En mettant en œuvre ce plan d’action innovant, Infrabel se donne les moyens de faire diminuer le nombre de ce type d’incidents, qui sont malheureusement encore trop fréquents. Au-delà de l’ensemble de ces nouvelles mesures, notre gestionnaire d’infrastructure poursuit ses actions en bonne entente avec la SNCB pour améliorer la ponctualité. Conformément aux contrats de performance et de service public, et grâce aux nouveaux moyens dégagés pour le rail, elles agissent partout là où elles ont des leviers pour le faire pour répondre aux attentes légitimes des voyageurs, et faire du train la colonne vertébrale de la mobilité des Belges ! »
Des incidents resteront inévitables, alors Infrabel entend optimiser leur gestion. On estime à 3h30 le temps moyen nécessaire au rétablissement du trafic suite au heurt d’une personne. C’est clairement trop long ! Des démarches ont été entreprises vers les parquets pour sensibiliser les magistrats aux conséquences, pour les usagers, d’une arrivée tardive sur place. Infrabel planche également sur des mesures permettant d’accélérer le temps d’intervention des pompes funèbres.
Enfin, d’ici fin 2024, « Access to Railway » sera fonctionnel. Il s’agit d’une application innovante qui, couplée à une géolocalisation, communiquera aux services de secours l’accès le plus aisé à un site ferroviaire théâtre d’un incident. L’objectif est, là encore, de limiter le temps d’intervention/l’impact sur la ponctualité, au bénéfice de clients dont les attentes d’amélioration sont légitimes.